Ce dimanche, les cinq équipes de la course autour du monde s’apprêtent à prendre le départ d’une troisième étape de 12 750 milles. La plus longue de l'histoire de The Ocean Race, entre Cape Town et Itajaì au Brésil. Soient 30 à 36 jours de mer, dans les quarantièmes rugissants et les cinquantièmes hurlants. Une première pour des IMOCA menés en équipage, qui enrouleront les trois grands caps du parcours, sans escale, dont le mythique Cap Horn. Mais une zone bien connue de Kevin Escoffier, deux Volvo Ocean Race et un Trophée Jules Verne au compteur, leader au classement général avec deux victoires en autant d’étapes. Le skipper d’Holcim-PRB, installé à Lorient depuis plus de 15 ans, nous a accordé un entretien.
Kévin, deux étapes, deux victoires : comment expliques-tu cette réussite ?
Ces résultats s’expliquent d’abord par l’excellent niveau de fiabilité et de performance du bateau. Holcim-PRB est un bateau qui est bien né et qui a ensuite bénéficié de l’expérience de mon équipe technique pour devenir opérationnel en peu de temps. Nous sommes également parvenus à trouver rapidement comment le mener aux avant-postes, devant des bateaux avec plus d’expérience, malgré le peu de temps passé à naviguer ensemble. Mais c’est ainsi que j’avais composé mon équipage : je me suis appuyé sur des personnes qui ont la connaissance des bateaux rapides et qui avaient déjà de l’expérience en équipage réduit. Il ne faut pas non plus négliger la gestion du projet, aussi importante dans la recherche de performance que la régate en elle-même et qui nous permet d’être réactifs aux escales, d’avoir un bateau prêt à naviguer peu importent les soucis. Marine Derrien (Team Manager) et Alice Poursain (Responsable logistique) ont donc un rôle tout aussi clé et nous permettent d’être le plus performants possible, tant sportivement que dans notre organisation.
La route est évidemment encore longue, mais vous devez forcément aborder cette troisième étape avec un atout de confiance…
Je préfère être là où je me trouve que 5e, c’est certain ! Mais je suis conscient que si nous faisons 5 mauvais résultats sur les étapes à venir, personne ne se souviendra que nous avons gagné les deux premières. On parle d’étape compte double pour cette Leg 3, mais ce sont finalement deux étapes en une. Si tu casses quelque chose la première semaine, ce sont deux étapes que tu perds et non pas une. C’est important de savourer ses victoires mais elles sont désormais derrière. Maintenant, je me projette et je regarde devant.
Comment se comporte le bateau dans les mers du Sud et dans de telles conditions de sollicitation, en équipage ?
Je pourrai répondre à la fin de la course ? (Rires) Le bateau s’est montré très performant en Atlantique, il va très bien par mer plate, mais d’autres bateaux sont plus typés « gros temps ». Nous allons donc voir le delta de vitesse dans des conditions de mer plus formée, ce sera intéressant. C’est l’avantage de The Ocean Race, cela nous permet d’effectuer un premier test dans les mers du Sud, de trouver un moyen d’aller vite en conditions réelles. En équipage, on tire plus dans les bateaux, ce qui nous permet de les fiabiliser plus rapidement, en faisant moins de milles qu’en solitaire. On condense le temps nécessaire, c’est un avantage car la saison 2023-2024 va être très longue avec 4 transatlantiques et un autre tour du monde en plus de celui-ci. C’est une belle opportunité de pouvoir travailler sur tout cela à la fois.
« Lorient La Base, l’outil dédié à la course au large le plus pointu au monde »
Tu es natif de Saint-Malo, tu as travaillé à Port-la-Forêt et tu as arpenté nombre de grands ports au gré de tes différentes courses autour du monde : comment le site de Lorient La Base s’est-il imposé à toi pour installer ton projet ?
Je suis arrivé à Lorient en 2007 pour travailler pour Banque Populaire et j’ai vite réalisé que les outils dont nous disposons à Lorient pour nous permettre de travailler en tant que marins sont formidables. Mon début de projet avec Holcim-PRB a été quelque peu itinérant avec les différents chantiers nécessaires à la finalisation du bateau, mais j’ai maintenant envie de m’ancrer à Lorient et de m’y inscrire dans le long terme. Nous nous installerons donc dans notre nouveau bâtiment, actuellement en construction à l’entrée de La Base, au retour de The Ocean Race.
La qualité de vie à Lorient est très importante pour mon Team et pour moi. Sur The Ocean Race, nous voyageons dans de magnifiques villes, toutes tournées vers la mer, et nous nous rendons encore plus compte de ce qu’on a à Lorient. Aujourd’hui, la base des sous-marins est l’outil dédié à la course au large le plus pointu au monde. Les choix faits par Lorient Agglomération ces dernières années ont permis de développer notre sport et de la faire rayonner à l’international. Nous avons des infrastructures de qualité, les sous-traitants sont tous à proximité directe, nous pouvons travailler plus rapidement et nous évoluons au sein d’un éco-système qui nous tire tous vers le haut. Nous pouvons en être très fiers.